Habeas corpus

30 mars - 4 avril 2020

Habeas corpus, plus exactement Habeas corpus ad subjiciendum et recipiendum, est une notion juridique qui énonce une liberté fondamentale, celle de ne pas être emprisonné sans jugement, contraire de l'arbitraire qui permet d'arrêter n'importe qui sans raison valable. En vertu du principe, toute personne arrêtée a le droit de savoir pourquoi elle est arrêtée et de quoi elle est accusée. Ensuite, elle peut être libérée sous caution, puis amenée dans les jours qui suivent devant un juge.

Habeas corpus
Article 6, 4 avril 2020

On nous géolocalise
Pour nous sauver

Géolocaliser?
Nous placer sur une carte grâce à notre smartphone
Puis, tracer nos déplacements
Au pire, savoir ce que nous avons fait

Ces jours: confiné, si tu bouges, on te voit: ta carte sim te trahit
Sanction, retour à la maison
La prochaine fois, en prison
Simple
Le rêve totalitaire

Mais bon
C’est temporaire face à l’urgence
C’est anonyme face cachée
Les données sont détruites après tant d’heures
Où est le problème?

Et la tentation de continuer, après?
Big data, big brother
Attention, théorie du complot

(A prononcer avec une petite voix moqueuse)

A vélo, sur un col
Isolé
Pas de réseau cellulaire
Pas de service
Pas de téléphone
Pas de géolocalisation
Un sentiment d’évasion
S'évader

Et le ciel est de plus en plus bleu

 

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Habeas corpus
Article 5, 3 avril 2020

Vaccin
Course au vaccin
Compétition entre laboratoires
Non, collaboration
Enfin, le premier qui trouve gagne
Un pactole, le Nobel, l’immortalité

En attendant, cap sur les antiviraux
Même course

Mais encore
« Peut-être qu’un médicament connu a des effets inconnus, bénéfiques contre le coronavirus »
Alors, on ratisse large
Un infectiologue Marseillais croit avoir trouvé le Graal
Hydroxychloroquine, ennemi du paludisme et de l’arthrite,
Rien que le nom devrait effrayé Covid-19
Comme les cris du pasteur Kenneth Copeland
Qui tue en direct le virus
Le médecin, lui, a promis dépistages gratuits et soins au remède miraculeux, qui sait?
Dans le doute, on réquisitionne les stocks

(Pr Didier Raoult à Marseille)
(Pr Didier Raoult à Marseille)

 A Marseille, depuis, il y a la queue à la porte de l’institut du docteur
Druide, Tournesol, anti-establishment (j’adore ce mot)

Mais, amnésiques, nous avons oublié 2003
Et le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS)
Maladie infectieuse
A l’origine, un coronavirus inconnu
Mortalité: 10%, un monstre comparé à son semblable de 2019

A ce jour encore
Il n'existe ni vaccin, ni traitement spécifique
Pour cause, on n’a pas cherché
Poil au nez
Une fois l’épidémie disparue
Pas d’argent à gagner, pas d’investissements privés, nah!

Et les Etats?
« Prompts à dépenser des milliards pour acheter des avions de combat et autres artifices de défense, ils en ont négligé des ennemis plus sournois. Selon des experts, soutenir la recherche académique afin de mettre au point un médicament contre les coronavirus aurait coûté, en 2003, entre 200 et 300 millions d’euros si les autorités étatiques avaient agi de manière coordonnée. Cela semble bien dérisoire, lorsque l’on compare cette somme aux coûts humains et économiques déjà engendrés par l’épidémie. » (Le Temps, 11 mars 2020)

Et le ciel est de plus en plus bleu

 

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Habeas corpus
Article 4, 2 avril 2020

Dans le langage du coronavirus
Essentiel, de première nécessité s’oppose à vital, à ce qui n’est pas indispensable
Ou inutile, futile, anodin, de deuxième classe
Bref, le central reléguant le reste à la périphérie, dans les marges
Même si selon Godard, «  ce sont les marges qui font tenir les pages »

 

                        Kasimir Malevitch (1878 - 1935), Carré noir [1923 - 1930]
Kasimir Malevitch (1878 - 1935), Carré noir [1923 - 1930]

 

Les autorités fédérales, acculées, ont fait de la philosophie pratique
Ce qui est ouvert ou fermé au public pour lutter contre Covid-19
Ce qui nécessaire et ce qui ne l’est pas pour tenir tête à la bête
Définition concrète de nos sociétés

Fermé
les magasins et les marchés;
les restaurants;
les bars, les discothèques, les boîtes de nuit et les salons érotiques;
les établissements de divertissement et de loisirs, notamment les musées, les bibliothèques, les cinémas, les salles de concert, les théâtres, les casinos, les centres sportifs et de fitness, les piscines, les centres de bien-être et les domaines skiables, les jardins botaniques et zoologiques et les parcs zoologiques;
les prestataires offrant des services impliquant un contact physique tels que salons de coiffure, de massage, de tatouage ou de beauté;
les campings.

Ouvert
magasins d’alimentation et autres magasins (p. ex. kiosques, shops de stations-service) qui vendent des denrées alimentaires ou des biens de consommation courante, dont l’acool; et des plantons, et des semis;
services de petite restauration à l’emporter, cantines d’entreprises, services de livraison de repas et services de restauration pour les clients des hôtels;
pharmacies, drogueries et magasins vendant des moyens auxiliaires médicaux (p. ex. lunettes, appareils auditifs);
offices et agences de poste;
points de vente des opérateurs de télécommunication;
banques;
stations-service;
gares et autres infrastructures de transports publics;
ateliers de réparation de moyens de transport;
administrations publiques;
services du domaine social;
inhumations dans le cercle familial restreint;
établissements de santé tels qu’hôpitaux, cliniques et cabinets médicaux ainsi que cabinets et établissements gérés par des professionnels de la santé au sens du droit fédéral et cantonal;
hôtels, établissements d’hébergement et places de stationnement pour caravanes et camping-cars, prévues pour une location durable ou pour les gens du voyage.

Et le ciel est de plus en plus bleu

 

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Habeas corpus
Article 3, 1 avril 2020

Celles et ceux qui travaillent
À deux doigts du virus, coronavirus, Covid-19
Celles et ceux qui sont applaudis chaque soir
À la fenêtre, au balcon, à l’écran du smartphone

Faire la liste
A l’hôpital
A la pharmacie
A l’épicerie
A la CoopMigros, Denner, Manor, AldiLiddel
A la blanchisserie
Aux guichets de la Poste, des banques
Sur les chantiers
Sur les routes
Aux champs
Et encore, etc.
J’en oublie
Autrefois prolétaires, puis travailleurs, puis salariés
Désormais collaborateurs

En attendant le Grand soir
Au quotidien
Après le vacarme bruyant d’éloges dictés
Par la peur et la culpabilité
Je reprends à leur compte
L’exclamation de JB artiste allemand
Évoquant des ramasseurs d’ordures qu’il avait vu à Madrid

« J’ai vu à quel point ils sont des grand génies. On le voit à la manière dont il font leur travail et au visage qu’ils ont en le faisant. On voit qu’ils sont les représentants d’une humanité future. »

Et le ciel est de plus en plus bleu

 

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Habeas corpus

Article 2, 31 mars 2020

 

Crise
En latin (médiéval): manifestation d’une maladie grave
En grec: à la fois juger et le jugement; discerner, distinguer

Nous sommes en crise
Nous vivons une crise
Enfin, plus ou moins
Moi, plutôt moins
Moi, privilégié, bobo, propriétaire d’une maison avec jardin, salaire assuré
Avec PC, bande passante, Smartphone
Avec épicerie locale à deux pas dans village paisible
La crise, c’est les autres

La crise, c’est dans l’ordinateur: à distance, à profusion, à n’en plus pouvoir
A la longue, je discerne mal
Le vrai du faux, le lard du cochon

Bien nourri, bien pourvu, bien éduqué, j’attends la catastrophe
Dans mon bureau plein sud, sans culpabilité
katastrophế = renversement, en grec
Mieux qu’une révolution: faire le tour pour se retrouver au même endroit

On assène: « tout sera différent »
Ce que je vois
Une furieuse envie de revenir à avant, de recommencer
La dictature du « re- «
Comme si ça allait de soi
Sans débat, sans parole (s) ou si peu, marginales, périphériques

Les milliards tombent par miracle
Où étaient-ils?
La dette n’est plus tabou
Jésus multipliait les pains et les poissons
L’Etat distribue les billets, sans conditions, charitable
Un peu comptable, cependant (garant et prêteur, faut pas exagérer!)
« Moins d’Etat!» qui disait ça?
En réalité, c’est l’Etat portemonnaie, comme papa et maman quand j’étais adolescent
Il faut qu’ils paient et qu’ils me foutent la paix

Bill Clinton (1992): « It’s the economy, stupid »
Voilà ce qui compte, à la fin (fuck the virus)
Que l’on consomme pour produire
Que l’on produise pour consommer
Proposition d’éminents économistes:
« L’Etat doit payer les salaires de tous les travailleurs suisses pour soutenir le pouvoir d’achat et créer de la demande, qui est l’élément clé de la crise actuelle »

Ensuite, tout reprend de plus belle
Chacun à sa place
Une caissière reste une caissière
Un infirmière reste une infirmière
Un prof reste un prof
Un entrepreneur reste un entrepreneur
Un trader reste un trader
À deux mètres de distance ou par skype (zoom c’est dangereux)
En attendant….
Sous le ciel de plus en plus bleu

 

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Habeas corpus

Article 1, 30 mars 2020

Restez à la maison
Gardez vos distances (2 mètres, bon sang)
Ne vous rassemblez pas (5, 2, 1, 0)
Les bises, c’est non
Je te serre la main, poisson d’avril
Dans le doute, j’évite, je me cache, je diffère

Dehors, à distance
Les sanctions menacent
Les amendes tombent
Les condamnations frappent

C’est une guerre!, proclament les chefs d'Etat
Ils déclarent l’état d’urgence, l’état de nécessité, l’état de fébrilité
A l’est, on se donne les « pleins pouvoirs »
A l’ouest, on se chamaille
Sécurité ou liberté? (liberté de circuler, de travailler, de profiter, de capitaliser?)

Assez bavardé, mon dieu
Les temps sont exceptionnels, hors du commun
Bibliques, osent les plus dévots
Il faut des mesures fortes, radicales, viriles
Moteur, action
Les mauviettes au pas
La pensée, c’est pour après

Enfermé, je laisse faire
J’obéis
Alors
Je compte, je conte, sur des écrans évanescents
Les malades, les morts, les rescapés
Je cherche pourquoi, comment, qui, quoi, où, combien
A ne plus soif
A perdre la vue
Jusqu’à sortir de mes gonds
Jusqu’à préparer mon quatrième cake en quatre jours
Sous le ciel de plus en plus bleu

 

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